Grève générale: un mouvement bien suivi, un pays au ralenti
C'est une première depuis 1993: ce lundi 30 janvier est décrété journée de grève générale. Bon nombre de travailleurs se croisent les bras, tous secteurs confondus. Le front commun syndical s'oppose aux mesures d'austérité du gouvernement Di Rupo.
Un mouvement national décidé en front commun, ce n'était plus arrivé depuis près de 20 ans. Les syndicats entendent ainsi protester contre les mesures d'économie prévues par le gouvernement fédéral. Ils pointent le manque de concertation sur la mise en œuvre de ces économies budgétaires.
Et le mouvement semblait plutôt bien suivi. Ce lundi, une bonne partie de la Belgique est paralysée. Dans les transports publics, plus rien ou presque ne circule. Sur le rail, le trafic national est complètement interrompu depuis dimanche soir. Idem pour les trains internationaux Thalys ainsi que pour les Eurostar vers et au départ de Bruxelles.
Les transports en commun touchés
A Bruxelles, jour de Sommet européen, aucun tramway, bus ni métro de la STIB ne roule. En Wallonie, la situation peu varier d'un TEC à l'autre mais dans l'ensemble, on évoque un "quasi arrêt" des transports publics wallons. Au nord du pays, le réseau De Lijn est également très perturbé, aucun tramway ne circulant par exemple à Gand.
Si les contrôleurs aériens n'ont pas fait grève, l'aéroport de Charleroi a été contraint de fermer ses portes. L'aéroport de Bruxelles a pour sa part continué à tourner, même si plusieurs vols ont dû être annulés.
bpost a été touchée différemment en fonction des régions. Pratiquement aucun courrier n'a pu être distribué dans une grande partie du sud du pays, en raison de l'arrêt des deux centres de tri wallons, à Charleroi et Liège. Sur l'ensemble du pays, 75% des tournées ont été assurées et 94% des journaux ont été livrés lundi matin tandis que 89% des bureaux de poste ont ouvert leurs portes.
Dans tout le royaume, les écoles n'ont pas été épargnées par la grève. Le mouvement semble avoir été bien suivi par les enseignants, particulièrement dans les villes et dans l'enseignement primaire et secondaire.
Un mouvement très suivi en Wallonie
La grève a dans l'ensemble été bien suivie dans les plus grandes villes wallonnes. A Charleroi, Liège, Namur, Mons, et dans la région du centre notamment, les accès aux zonings industriels ont été occupés par des piquets. Des centres commerciaux ont été touchés par des actions syndicales, de même que les prisons, comme à Jamioulx ou Lantin, et les hôpitaux, qui assurent toutefois un service minimum. A Bruxelles, 45 policiers ont remplacé les gardiens grévistes des prisons de Saint-Gilles et de Forest.
De nombreuses grandes entreprises sont elles aussi à l'arrêt, notamment dans le secteur du textile qui est complètement paralysé.
Sur les routes, si l'heure de pointe du matin a été particulièrement fluide sur les grands axes menant à Bruxelles ainsi que sur le ring de la capitale, plusieurs barrages ont été dressés à travers le pays ainsi qu'à proximité des postes frontières français (Hensies) et allemands (La Calamine et Hauset).
Enfin, en Flandre, les ports d'Ostende, Zeebrugge, Gand et Anvers sont pour ainsi dire à l'arrêt.
Les syndicats parlent de "réussite"
Rassemblés au Rond Point Schumann, au cœur du quartier européen de Bruxelles, les leaders des trois grands syndicats belges ont symboliquement présenté, lundi midi, la première euro-obligation.
"Nous voulons adresser un message clair à l'Europe et dire à ses dirigeants qu'il existe des alternatives à l'austérité", a expliqué Claude Rolin, secrétaire général de la CSC.
"L'austérité n'est pas la solution, elle est le problème", a renchéri Anne Demelenne, secrétaire générale de la FGTB. Forts de cette conviction, les syndicats - qui se félicitent par ailleurs de la réussite de la grève générale de ce lundi - plaident non seulement pour la création d'euro-obligations mais aussi pour une fiscalité plus juste et pour la mise sur pied d'un véritable plan de relance.
Vers d'autres grèves?
Interrogés durant le journal télévisé de la RTBF ce lundi midi, les représentants syndicaux ont une nouvelle fois fait part de leurs revendications. "Pour nous, le fait d'entendre toujours la Commission européenne et les dirigeants européens dire qu'il n'y a pas d'autre alternative que l'austérité, nous disons que ce n'est pas vrai. On est en train de mentir à la population. Et malheureusement, tout cela est relayé par les gouvernements des États-membres", a indiqué Anne Demelenne (FGTB). Cette dernière souhaite que soient mutualisées les dettes, pour que les États remboursent "avec des taux d'intérêt normaux". Anne Demelenne a ensuite évoqué "la colère" pour expliquer la présence de certains blocages sur les routes belges ce lundi.
Certains élus libéraux ont critiqué cette grève et les mouvements qui l'accompagnent. Pourtant, les manteaux "bleus" étaient de sortie ce lundi. "Le gouvernement s'est lancé dans des mesures extrêmement dures, prises dans une précipitation incroyable qui sont tout à fait à l'opposé de notre tradition de dialogue social", a indiqué Bernard Noël, secrétaire national de la CGSLB. "C'est le moment de revenir sur certaines mesures et de rééquilibrer les choses."
"J'espère que le gouvernement va entendre ce que disent les travailleurs de ce pays, entendre ce que disent les allocataires sociaux", a enchaîné Claude Rolin (CSC), évoquant le fossé séparant le gouvernement et les citoyens belges. Le leader de la CSC n'exclue pas d'autres grèves. "Le mouvement syndical est bien décidé à continuer la mobilisation, nous allons continuer à faire pression pour que la raison obtienne gain de cause."
Invité sur le plateau de la RTBF, Pieter Timmermans, directeur général de la FEB (Fédération des Entreprises de Belgique), a indiqué avoir été choqué en apprenant que certains travailleurs n'avaient pu se rendre sur leur lieu de travail. "En général, et nous avons fait un petit sondage, la plupart des gens avaient envie de travailler", a-t-il assuré. Pieter Timmermans estime également que la situation est différente au nord et au sud du pays.
Un sommet européen perturbé?
C'est dans ce contexte particulier que la capitale belge accueille un (nouveau) sommet européen. Les 27 doivent discuter de deux thèmes principaux, l'emploi et la croissance, particulièrement d'actualité en ce lundi de grève.
PIAB avec Belga